Analyse du CIM Press 2022
24-11-2022

Le glas des imprimés a-t-il sonné ?
Analyse du CIM Press 2022

Alors que l’édition précédente remontait à 2020, une nouvelle étude CIM Presse vient d’être publiée. En raison de la pandémie, empêchant d’utiliser la méthodologie habituelle, la collecte de données n’a pu se faire pour une publication en 2021. Le rapport CIM Presse 2022 contient les chiffres d’audience de divers journaux, magazines et autres titres de presse, tant imprimés que numériques.

Méthodologie

Après deux années quelque peu perturbées, la méthode d’analyse des publications imprimées a dû être adaptée. L’échantillon a été réduit par rapport à la publication précédente, 8 200 questionnaires ayant été remplis en ligne et hors ligne.

Cet échantillon reposait également sur une nouvelle combinaison de recrutements et un délai de réalisation plus court. Cet échantillon réduit est toutefois plus fort, selon le CIM. Les questionnaires sont devenus plus « mobile friendly » et le groupe cible est désormais 16+.

Le glas des imprimés a-t-il sonné ?

L’évolution des titres imprimés est variable. On remarque que les titres habituels sont stables, qu’il y a ceux qui évoluent bien et ceux qui accusent le coup.

« L’imprimé est mort » est une phrase que nous entendons souvent, de plusieurs sources. Cependant, cette publication confirme que les journaux n’ont pas connu de recul drastique en termes de public national, et sont même restés stables en termes d’audience totale.

L’indicateur « Total Brand », qui tient compte des points de vente en ligne, a signé une forte augmentation pendant la pandémie, due à la numérisation croissante des contenus (actualités). Depuis, cette croissance est retombée. Cette évolution est peut-être due à la restriction grandissante du contenu gratuit sur les sites Web. Ce phénomène a une influence positive sur la « monétisation » de contenu, mais réduit fortement l’audience. En outre, l’augmentation sans précédent du prix du papier, de 74 %, n’aide évidemment pas le secteur de l’impression.

Les maisons d’édition ne parlent pas non plus de la mort de l’imprimé dans leur communication officielle sur la publication CIM.

Philippe Belpaire, directeur général de Roularta, a ainsi fait état de chiffres record et indiqué être en tête du marché belge des magazines. Leur hebdomadaire De Zondag est le plus grand du pays, avec une audience de 1,3 million de lecteurs.

Si l’on examine les chiffres du Zondag au niveau du groupe cible Principal Responsable des Achats (PRA) 18-54, on remarque que l’audience du magazine chute de 8 % de, 460 860 à 421 760.

Le magazine Lifestyle flamand de Roularta, Libelle, est également le plus grand magazine payant, avec 867 000 lecteurs, et a augmenté de 12 % par rapport à septembre 2020. Dans le groupe cible PRA 18-54, le nombre de lecteurs a augmenté de 7 %, passant de 263 050 à 281 600. Son homologue francophone Femmes d’aujourd’hui connaît également une hausse de 16 % au total, et de 4 % au niveau des PRA 18-54.

Du côté de Roularta, le Vif/l’Express est également en hausse de 17 % et de 12 % au niveau des PRA 18-54. Knack compte encore 125 790 lecteurs contre 134 290 en 2020 au niveau des PRA 18-54.

Ce qui n’est pas dit, c’est que les ventes en vrac (-3,6 %) et le nombre d’abonnés (-2,2 %) chez Roularta sont en baisse à cause de l’hésitation accrue du consommateur.

On parle de tendance baissière générale de la lecture chez le Belge, qui connaît un repli total de 5,9 %. Ceci est en partie dû au glissement vers la consommation d’informations sur les médias numériques. Roularta affirme que toutes ses marques se sont fortement améliorées grâce à leurs investissements dans le «kiosque numérique» pendant la pandémie. Cependant, les nouveaux chiffres font également état d’une baisse générale du public Web pur ainsi qu’une baisse générale de 2,7 % dans les journaux. Le déclin du public Web entraîne également une baisse des ventes de la publicité numérique, tandis que la publicité papier était encore en hausse.

Mediahuis déclare quant à elle avoir quotidiennement une audience de plus de 1,9 million de lecteurs, soit 1 Flamand sur 3. Avec De Standaard, Het Nieuwsblad, De Gazet van Antwerpen et Het Belang van Limburg, Mediahuis peut se targuer d’être le plus grand éditeur de journaux de Flandre. Les journaux mentionnés ci-dessus occupent également les positions deux à cinq en termes de nombre de lecteurs quotidiens en Flandre. Dans l’ensemble, les titres de Mediahuis ont chuté de 11 %, passant de 705 490 lecteurs à 626 100 pour les PRA 18-54.

IPM s’est qualifié dans sa communication officielle de l’un des « gagnants » de la CIM Presse 2022. Signalons une croissance remarquable pour La Libre (+35 %), et la bonne performance de la DH les Sports et de L’Avenir. Ils affirment également que Moustique et Paris Match résistent mieux que leurs concurrents. Même si on remarque au niveau du groupe cible PRA 18-54 que les deux magazines chutent en termes de nombre de lecteurs, Moustique a encore environ 78 240 lecteurs (-15 %) et Paris Match 74 700 (-16 %).

DPG continue de bénéficier d’un public quotidien de plus de deux millions de lecteurs et surfeurs par jour, restant ainsi le plus grand journal du pays malgré un net déclin du public.

D’autres magazines et revues, comme HUMO et des marques lifestyle, bénéficient d’une augmentation au niveau de l’indicateur « Total Brand » selon DPG. TeVe-Blad augmente de 47 % sur les PRA 18-54, passant de 61 550 à 90 460. Cependant, HUMO diminue de 10 % sur les PRA 18-54, à 160 300 lecteurs.

Dans le même groupe cible, Autogids et BRUZZ augmentent également de 12 % et 9 % respectivement. Delhaize Magazine semble avoir le plus grand nombre de lecteurs sur les RDA 18-54, avec 626 100 dans le nord et 670 820 dans le sud, soit une hausse de 53 % par rapport à 2020.

La différence entre le nord et le sud est également remarquable. Les grands titres dans le nord, comme Het Laatste Nieuws (-24 %), Het Nieuwsblad (-16 %) et De Standaard (-19 %) assistent à un repli de leurs lecteurs dans les PRA 18-54. Seul De Tijd connaît une légère progression en termes d’imprimés, mais recule également de 22 % au niveau des PRA 18-54, tout comme De Morgen (- 19 %). Le déclin est donc généralisé dans toute la Flandre, tandis que les titres de qualité francophones du sud comme l’Echo (+20 %), Le Soir (+34,8 %) et La Libre (+35 %) affichent de biens meilleures performances. Ils arrivent également à 28 %, 46 % et 35 % sur les PRA 18-54.

La communication des régies médias doit bien entendu toujours être prise avec des pincettes, car elles tirent leurs conclusions des chiffres et des groupes cibles qui permettent de montrer leurs titres sous leur meilleur jour.

Nous pouvons toutefois en conclure que l’imprimé a encore clairement de beaux jours devant lui. Cependant, le CIM Presse 2022 se caractérise par un écart entre les chiffres décevants des grandes puissances du nord et les bonnes performances du sud. Cette situation, conjuguée aux conséquences de deux années tumultueuses et au glissement numérique, va certainement accentuer la division du paysage des imprimés en Belgique. Nous sommes curieux de savoir ce que les chiffres CIM suivants nous diront à ce sujet !